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Article dans "Le Mauricien"

Dernière mise à jour : 21 sept. 2020

Geneviève Bonieux interroge… l'art de l'enfance

"Je ne peux renoncer ni aux volumes ni à la couleur. Il me faut les deux ! ".Pour satisfaire ce besoin irrépressible, l'artiste Geneviève Bonieux est de ces sculpteurs qui font beaucoup d'expérimentations sur les matériaux, ne serait-ce que pour les colorer et peindre dessus.

Inscrite sur son site, l'expression "baroque tropical" va comme un gant à ce travail. Aussi y voit-on de temps en temps l'influence de l'Art nouveau, particulièrement lorsqu'elle conçoit du mobilier à l'instar des lampadaires en résine et fibre de verre qu'elle expose chez Imaaya, ou encore d'un impressionnant "banc octopus" (www.bonieux.com). Ici, la résine est associée à une sorte de bronze travaillé à froid. La lampe donne l'apparence de la pâte de verre, mais elle a les qualités d'un plastique moderne, à la fois léger et incassable. Le banc est réalisable ici parce que beaucoup moins couteux et beaucoup plus léger que s'il avait été coulé en bronze !

L'autre avantage de la résine est la translucidité, que l'artiste exploite notamment pour ses bas ou haut reliefs, aux formes plus ou moins saillantes. Ces derniers peuvent, en effet être acollés à une fenêtre permettant à la lumière d'agir en contre-jour pour donner des effets de transparence et foncer les parties plus opaques et colorées. Pour que tous les éléments soient clairement visibles et de manière équilibrée, on préfère un support neutre tel qu'un mur. Mais l'intérêt du relief pour cette artiste est surtout qu'il lui pemet de marier peinture et sculpture, avec des couleurs vives, un peu dans l'esprit de ceux qu'elle vénère comme ses maîtres… l'architecte Antoni Gaudi et la plasticienne Niki de Saint Phalle.


Aspirations originelles

Évidemment, lorsqu'elle propose "Les gorges de la Rivière Rouge", qui montrent un paysage forestier et pentu traversé par une rivière rouge, l'association du sang et d'un certain paysage mauricien paraît évidente. L'enfant du pays avoue adorer se ballader dans ces gorges encaissées de Rivière Noire, mais l'interprétation ne tient pas à cette seule caractéristique identitaire. La rivière de sang n'exprimerait-elle pas aussi les méfaits de l'humanité et de la guerre, la marque de l'homme dans la nature, suggérée par la violence de cette travée presque droite qui barre le paysage…

L'étonnante série que l'artiste a commencé à réaliser sur l'enfance et la mythologie est une critique aussi humoristique que sévère de l'imagerie ridicule que les adultes imposent aux enfants depuis quelques décennies… Les représentations des mythologies ont le don de traverser les siècles, inspirant les artistes et créateurs du monde entier, générant une imagerie symbolique, visuelle et littéraire qui ne cesse de se renouveler dans l'imaginaire humain. En choisissant de représenter certains de ces mythes avec les jouets d'aujourd'hui, ces objets industriels offerts en abondance à Noël, tels que des mini copies de poupées Barbie ou encore des dragons en plastique biscornus, Geneviève Bonieux interroge la société sur ce qu'elle offre à ses enfants.


Vénus à talons

Cette petite Vénus aux chaussures vertes à talon qui piétinent de gros bonbons rouge en forme de cœur serait la représentation actuelle de l'amour ! Et pour Pâris, l'artiste a du arpenter les rayons jouets pendant des heures avant de pouvoir enfin trouver une poupée masculine qui ne soit pas affublée d'une arme tranchante ou d'une mitraillette ! Et le personnage issu de Dragon ball qu'elle a trouvé, a la posture encore très martiale. Alors qu'on offrait jadis des petits baigneurs aux enfants pour qu'ils apprennent à les habiller et déshabiller, il est aujourd'hui difficile de trouver des poupées nues… du moins que l'enfant peut déshabiller. L'artiste s'en étonne : "On sait pourtant, commente-t-elle, que les enfants de moins de dix ans ont tous vu au moins une fois un film pornographique sur internet. Cela signifie qu'aujourd'hui, ils ont le choix entre la pornographie et la pudibonderie. Mais ils n'ont pas de représentation saine et simple de la nudité !" Geneviève Bonieux est aussi cette artiste qui avait impressionné au Centre Wallonie-Bruxelles, à Paris en 1993, avec ses baigneurs miniatures, qu'elle mettait en scène dans l'eau. Ces petites sculptures exprimait toute la liberté et la joie du corps qui s'ébat dans cet élément qui nous libère un peu de l'apesanteur, et des pesanteurs de la vie.

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